Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Coralie LE MEUR, 25 ans et passionnée des grands camélidés depuis 10 ans.
Quel est votre parcours professionnel ?
J’ai quitté la faculté de Montpellier pour aller parcourir le monde des grands camélidés et ainsi me créer un parcours professionnel hors norme pour une française. Jockey professionnel à dromadaire en Australie, diplôme d’entraineuse de dromadaire en Égypte, Special Guest Trainer à la Camel clinic au Texas sur plusieurs années et reconnue en Europe comme coach avec approche éthologique des grands camélidés. Sans compter mon élevage de dromadaires à Frontignan et mes activités de guide chamelière.
Dans quelle ville habitez-vous actuellement ?
Je suis située à Frontignan dans l’Hérault. Ma ferme cameline se trouve sur le massif de la Gardiole, un environnement que j’aime arpenter et qui convient à l’élevage.
D’où vous est venu cet amour pour les chameaux ?
Ma mère est également une passionnée de grands camélidés. C’est elle qui a créé l’association Dromasud avec l’acquisition de nos deux premiers dromadaires Touareg et Tyrki. Je montais un peu à cheval et j’ai totalement basculé pour ces animaux atypiques et hors du commun.
Possédez-vous des chameaux ? si oui, combien ?
Je possède actuellement 5 dromadaires. J’en ai eu jusqu’à 10 et je viens de perdre mon entier.
Vous préférez les chameaux à 1 bosse (Camelus dromedarius) ou à 2 bosses (Camelus bactrianus) ?
J’ai une préférence pour les dromadaires mais je ne suis pas contre les chameaux non plus. Le climat de ma région est simplement plus adapté aux dromadaires. Ils ont des caractères bien différents, ce qui fait tout leur charme.
Parmi les merveilles anatomiques et physiologiques du chameau, laquelle vous fascine le plus ?
Les pieds du dromadaire sont intrigants. Ils sont composés de 2 doigts bien distincts avec une boule graisseuse montée sur un coussinet épais et souple, permettant au dromadaire de passer sur tout type de sol du moment qu’il n’y a pas trop de pente.
Quel est votre plus beau souvenir avec un chameau ?
Les plus beaux souvenirs sont ceux que j’ai pu passer avec ma caravane, guidée par mon entier. Juchée sur le dos du premier et avoir cette longue file qui suit silencieusement sur les chemins de la garrigue, intriguant les passants et donnant l’impression d’être sortis tout droit d’une autre époque.
Quel est votre « pire » souvenir avec un chameau ?
Mon pire souvenir est celui de ne pas avoir pu aider une chamelle qui avait subi de mauvais traitements à revenir dans le droit chemin. Elle était très sensible et douce mais je n’ai pas eu assez de temps pour la faire redevenir totalement elle-même. La perte de mon entier Tyrki m’a aussi bouleversée car cela faisait 10 ans que nous tissions des liens, c’était le fier étalon de l’élevage et on pouvait lui poser des enfants de deux ans sur le dos. Il nous a laissé qu’un petit, Titouan de la Gardiole.
Quelle est votre plus grande réussite/fierté dans le monde de ces grands camélidés ?
Ma plus grande fierté est d’avoir appris, par le biais de mes dromadaires, qu’il est possible de tout faire si on sait garder patience et que l’on reste constant dans ses demandes. Cela vaut dans tous les moments de notre vie également, pas simplement avec les animaux. Je n’ai pas assez de recul pour être fière de quoi que ce soit, j’apprends chaque jour. Peut-être que dans 30 ans j’aurais réussi à accomplir quelque chose qui vaille la peine d’être mis en lumière.
Quel est votre plus grand échec/déception dans l’univers de ces grands camélidés ?
Ma plus grande déception et j’espère qu’elle ne sera plus qu’un lointain souvenir dans quelques années, c’est qu’il n’y a pas assez de vétérinaires qui s’intéressent à nos animaux. Il y a trop de croyances et pas assez de science et ça nuit terriblement à leur santé.
Décrivez-nous une journée type de votre quotidien ?
Une journée type consiste à sortir au champ les dromadaires tôt le matin pour les laisser brouter en semi-liberté avant de les préparer pour les activités avec le public. Après avoir travaillé, c’est sieste obligatoire, les dromadaires ont besoin de repos quel que soit leur activité du jour. C’est un rythme à respecter. Puis, nous reprenons les activités jusqu’à ce que l’heure de rentrer à l’écurie approche. Les dromadaires sont à nouveau lâchés dans les champs pour profiter des derniers rayons du soleil.
S’il n’y a pas de réservation avec le public, je leur fais faire des exercices en carrière. Je prépare les plus jeunes à leur futur métier et surtout je passe beaucoup de temps à leurs côtés. C’est ça qui crée une relation.
Buvez-vous du lait de chamelle quotidiennement ?
Non, je ne bois pas du lait de chamelle quotidiennement mais j’aimerais beaucoup. Pour cela, il faut que des autorisations de commercialisation du lait de chamelle produit en France soient données et que le système agricole français prenne en compte nos animaux réellement. (NDLR : depuis le 30 novembre 2020, l’autorisation de produire et commercialiser du lait de chamelle en France a été accordée).
Quelle est votre recette ou plat préféré à base de lait de chamelle ?
Je n’ai pas de préférence de plat préparé à base de lait de chamelle. Le goût est si unique qu’il est difficile de faire un choix !
Qu’aimeriez-vous voir se développer ou s’améliorer dans le futur pour les chameaux ?
Dans un futur proche, je souhaiterais que les grandes instances reconnaissent réellement nos animaux avec des diplômes reconnus et que des normes de détention soient mises en place. De nombreux chameliers voudraient développer leur activité mais le manque de suivi administratif reste un frein énorme.
Comment pouvons-nous contribuer au développement culturel voire socio-économique des chameaux à travers le monde ?
A travers le monde, je ne sais pas ce qu’il faudrait faire. je ne connais pas assez bien les situations de chacun. Ce qui est sûr, c’est que dans notre pays le dromadaire devient une mode, et une autre façon de voir les choses face au bouleversement climatique. Soutenir les projets déjà mis en place, faire connaître cet animal méconnu qui gagne à être reconnu et ce sera un pas de plus sur une longue route.
Pourquoi selon-vous les chameaux seraient l’une des solutions à exploiter dans la transition écologique ?
Les grands camélidés permettent une grande variété d’activités que ce soit pour l’élevage, le lait, la viande, la laine ou bien sur le plan touristique en permettant la mise en valeur des paysages sans les abîmer. Un dromadaire ou chameau est très respectueux de son environnement. Ce sont des animaux qui sont dans la survie, ils s’adaptent facilement dans tous les milieux arides.
Vous êtes active sur les réseaux sociaux, que préférez-vous voir sur ces réseaux ?
Sur les réseaux sociaux, je m’attarde sur les publications ayant rapport avec les grands camélidés en particulier. J’observe également ceux qui éduquent d’autres animaux pour faire des parallèles et ainsi améliorer les connaissances dans la manipulation de nos bêtes.
Où pouvons-nous suivre vos aventures et retrouver vos activités/publications/articles ?
Le site internet de dromasud regroupe toutes les informations pertinentes. Nous avons aussi une page Facebook et un compte Instagram pour partager le quotidien de nos dromadaires et nos aventures.
Un mot de la fin pour les amateurs de chameaux ou ceux qui ne connaissent pas encore cet animal ?
Pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure cameline, formez-vous avant d’en acquérir car ce sont des animaux qui méritent une attention toute particulière. Ils sont attachants et attachés à leur propriétaire comme un chien. Ne voyez pas un animal débonnaire, ils sont bien plus surprenants que ce que vous pouvez imaginer.
Beau témoignage.
Pour développer la filière camélidés, il faudrait communiquer de manière professionnelle et constante avec le public afin de lui faire prendre conscience de l’existence de cet animal au delà du zoo et de ses atouts : impact sur l’envirnnement très réduit par rapport aux vaches, animal propre, doux et docile si bien traité (qui n’a rien a voir avec celui rencontré au zoo), lait de chamelle de qualité supérieure (protéines de meilleur qualité, plus de vitamins et minéraux, gout assez neutre, lait versatile,..) et lait bien meilleur que le lait de vache, lait utilisable dans de nombreuses applications (savon, crèmes, desserts, boissons…) ce qui aiderait fortement à populariser la filière.